Sur la voie de la réconciliation


Méditations au coeur du monde, Temps liturgiques / samedi, mars 26th, 2022
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Sur la voie de la réconciliationVivre la réconciliation est au cœur de l’Évangile de ce 4e dimanche de Carême, dit « de Lætare ». Nous aimerions que la réconciliation soit la réalité de notre monde touché par tant de haine et de guerres. Nous pensons bien sûr à l’Ukraine, mais notre regard ne doit pas se détourner de toutes les zones de notre monde où les conflits demeurent. Cette réconciliation que nous portons dans notre cœur ne doit pas seulement être un vœu pieux.
Nous avons à œuvrer au cœur de notre monde, de notre vie, pour que cela se réalise au cœur de nos vies pour celles des femmes et des hommes de ce temps. La réconciliation est aussi un thème dominant de ce temps Carême. Non seulement parce que c’est un de ses piliers, mais surtout, parce que sans réconciliation, ou du moins dans désir de réconciliation, nous passons à côté du message essentiel de Dieu.

Vers un chemin de réconciliation

L’humanité, depuis sa création, n’a jamais cessé de se laisser entraîner à des ruptures d’alliance. Nous cherchons, malgré nous ou poussés par l’ennemi de la nature humaine, à nous opposer au projet de Dieu. Il ne veut que notre bonheur, la concorde au lieu de la discorde, la paix au lieu de la guerre. Mais, nous, nous cherchons toujours à paraître. Nous nous efforçons avec force et grandeur à vouloir montrer que nous sommes meilleurs que les autres. Si seulement c’était une manière de croître dans la charité… Hélas, c’est davantage de l’orgueil mal placé qui nous guide au lieu de nous amener à un accroissement dans le service de la communauté humaine. Nous avons à prendre conscience que nous sommes interdépendants les uns des autres dans ce monde.

Sortir de notre égoïsme

Si nous voulons vivre en fils/filles de Dieu, nous avons à reconnaître que l’autre est aussi notre frère/notre sœur et que nous lui devons le service et la reconnaissance. Pas facile, avouons-le, d’entrer dans cette logique de Dieu. Il nous demande vraiment de sortir de la solitude de notre « petit moi » pour entrer dans la sollicitude avec chacun et chacune. C’est la clé de la page d’Évangile de ce dimanche. Cette parabole nous résiste souvent, car nous la contemplons sous l’angle de la justice et de la reconnaissance de la fidélité de l’œuvre accomplie. C’est un « c’est pas juste » qui monte de notre cœur.

Du côté du Père

Souvent, nous nous plaçons du côté du fils aîné. Lui a toujours été présent auprès de son père, il ne l’a pas abandonné, il a travaillé sans chercher le repos et la récompense. Son frère, qui a dilapidé le fruit du travail de son Père, est accueilli à son retour avec reconnaissance. C’est injuste, avouons-le. Toutefois, ce Père de la parabole n’est pas n’importe lequel. C’est Celui de toute miséricorde, qui nous appelle des ténèbres à la lumière. Il s’agit de Dieu. Avec Lui, rien n’est à l’identique de nos manières de penser.

La réconciliation au cœur de notre foi

Ne faisons pas porter sur Lui notre raisonnement, notre comportement. Il n’est pas un calque de nous. C’est l’inverse qu’il nous faut faire. Nous avons à chercher la manière dont nous pouvons nous rapprocher de Dieu. Dans cette quête de réconciliation, nous sommes invités à porter notre regard sur Dieu pour nous approcher au plus près de son amour et de sa miséricorde. C’est Lui, à la suite du Christ et poussé par l’Esprit, qui est notre modèle par excellence. Si nous comprenons cela, nous nous saisissons mieux pourquoi les bras, du Père de la parabole, qui se sont grand ouverts. Comment pourraient-ils être fermés alors qu’un de ses enfants vient lui rendre justice ? Il faut beaucoup d’humilité pour reconnaître la justice de l’autre.

Amis dans le Seigneur

Ce Père était aussi un « bon patron », alors à défaut de se reconnaître « fils », il peut au moins servir comme ouvrier. Mais, là n’est pas le désir du Père. Nous pouvons entendre ces mots du prophète Esaïe :

« C’est trop peu que tu sois mon serviteur pour relever les tribus de Jacob, ramener les rescapés d’Israël : je fais de toi la lumière des nations, pour que mon salut parvienne jusqu’aux extrémités de la terre (Es 49, 6) » ou bien encore Jésus, lors du Lavement des Pieds « Je ne vous appelle plus serviteurs […] je vous appelle mes amis, car tout ce que j’ai entendu de mon Père, je vous l’ai fait connaître (Jn 15, 15). »

Ces deux passages de l’Ecriture nous amènent à l’intuition d’Ignace de Loyola de devenir des amis dans le Seigneur. Ces amis qui sont les compagnons de Jésus, les intimes du Père.

L’Amour de Dieu nous invite à la réconciliation

Qu’importent nos pauvretés, nos maladies, nos infirmités, nos imperfections… nous sommes follement aimés du Père. Pour autant, ce n’est pas une raison pour ne pas nous convertir, bien au contraire. Parce que nous sommes aimés par le Père nous devons chercher à marcher vers cet amour en discernant la manière la plus juste d’entrer dans cette dynamique de réconciliation. Le baptême que nous avons reçu, dont nous renouvellerons les promesses lors de la fête de Pâques, doit nous entraîner à vivre de la vie de Dieu. Cette vie doit nous permettre de « voir toutes choses nouvelles en Christ », c’est-à-dire d’être capables de discerner ce qui dans notre vie, dans notre monde, est une occasion pour vivre et transmettre la réconciliation apportée par Dieu.

Dans les bras du Père

Réjouissons-nous donc d’être appelés par Dieu à entrer dans les mouvements de son cœur qui ne cesse de nous accueillir et de nous conduire vers la vraie joie, c’est-à-dire tendre vers la vie en abondance. Elle n’est pas une vie exempte de peine, de souffrance de tristesse. Elle est l’assurance que nous pourrons nous jeter, tel l’enfant de l’Évangile de ce dimanche, dans les bras du Père. N’oublions pas que son fol amour nous devance sur nos chemins quotidiens. Cette assurance peut alors nous conduire à nous réjouir avec le psalmiste et dire, comme lui : « Magnifiez avec moi le Seigneur, exaltons tous ensemble son nom. »

Puissions-nous vivre ce temps de Carême comme un moment favorable pour écouter le Seigneur nous inviter à entrer dans la joie de la réconciliation. C’est un chemin qui nous conduit à nous dépouiller de nous-mêmes, de notre suffisance, pour comprendre davantage que l’Amour de Dieu doit suffire et être le moteur de notre vie. Alors, demandons la grâce en ce dimanche de la joie de nous laisser entraîner par le Seigneur nous la voie de la réconciliation.