Dernière modification 2 heures by Chrétien en ce temps
« Le Fils de l’homme, quand il viendra, trouvera-t-il la foi sur la terre ? » Ces mots concluent l’Évangile de ce 29e dimanche ordinaire. Ils ne sont pas particulièrement optimistes et ne nous portent pas particulièrement vers l’espérance. Pourtant, ces mots sont ceux de Jésus tels que Luc nous les rapporte. Que peuvent-ils bien vouloir dire et comment cela résonne-t-il en nous et au cœur de notre engagement collectif, ecclésial, à la suite du Christ ?
La foi ou les œuvres ?
Dans cet Évangile, il ne s’agit pas d’Église, de communauté, de structures humaines fondées sur la foi qui seraient vouées à disparaître. L’interrogation de Jésus dans cet Évangile vient nous percuter dans notre confort de chrétien un peu ancien, un peu installé dans ses habitudes ecclésiales. Nous pouvons facilement avoir une pratique chrétienne un peu ronronnante, bien qu’habitée de quelques soubresauts métaphysiques.
Avons-nous la foi ?
Mais avons-nous la foi ? Sommes-nous véritablement des compagnons de Jésus, disciples-missionnaires, disponibles pour le servir, même au cœur du silence et de la nuit ? C’est, avouons-le, assez difficile à évaluer, car c’est de l’ordre de l’intime, du for interne, du dialogue intérieur entre notre cœur et la transcendance.
Qui suis-je ?
Il ne s’agit pas là d’une question philosophique ou rhétorique. Jésus, par cette question, vient nous demander une fois encore : « Pour toi, pour vous, qui suis-je ? » Chacun est invité à répondre à cette question dans son cœur, à l’intime de ce qu’il est et de ce qu’il ressent de cette relation. Ce n’est pas la première fois que Jésus nous interroge sur la foi : souvenons-nous de la parabole du grain de moutarde, il y a quelques semaines. Jésus veut sans doute nous sensibiliser, nous réveiller, tel un enseignant cherchant à attirer l’attention de ses auditeurs. Mais au-delà de l’effet rhétorique, il vient souligner la non-évidence de la foi. Même si la grâce nous a donné la foi, l’enthousiasme et le dynamisme pour choisir le Christ, rien n’est facile ni évident.
Qu’est-ce qu’avoir la foi ?
Avoir la foi, ce n’est pas d’abord « bien agir » ou « donner aux œuvres ». C’est une question de rencontre, de flammes qui se maintiennent vives pour éclairer et réchauffer nos vies. C’est une question d’amour, de confiance et d’audace. La foi, c’est – bien sûr – reconnaître le Christ comme Fils bien-aimé de Dieu le Père. Mais c’est aussi reconnaître que le Christ-Jésus nous devance sur les routes humaines.
Se laisser rencontrer par le Christ ?
Nous avons à accepter de faire l’expérience de nous laisser rencontrer par lui. Il vient sur nos routes humaines pour nous inviter à la foi. Aussi avons-nous à faire preuve de discernement, d’éveil aux signes des temps, pour découvrir, tel Jacob sur la rive du Yabboq : « Dieu était là et je ne le savais pas » (Gn 28, 16). Dans notre vie, il y a des événements, des situations, des rencontres et des paroles qui font jaillir en nous l’espérance. C’est cela, avoir la foi : garder fermement, au plus intime de nous-mêmes, l’assurance d’un avenir, car Dieu, en son Fils, a vaincu la mort.
Être avec le Christ
Cette foi, c’est donc bien autre chose que la pratique religieuse, les activités… Tout ce qui est de l’ordre du « faire ». Il s’agit bien plus d’être et de chercher comment il est possible d’être avec Dieu en étant avec nos contemporains. Ils sont visage du Christ et peuvent nous conduire à le découvrir à l’œuvre en cet âge. Regardons ce « juge dépourvu de justice » dans l’Évangile de ce dimanche. Il a fini par rendre la justice pour avoir la paix. Il fut ainsi témoin, à son corps défendant sans doute, de la générosité du Père.
Garder confiance
Ainsi, nous ne devons pas nous décourager dans les tribulations de notre vie, de notre monde. Nous savons que Dieu agit par nos mains en ce monde et en ce temps. Nous ne savons pas trop comment exactement, mais nous en avons l’assurance si nous mettons la foi au cœur de notre vie. Toutefois, elle n’est pas de l’ordre de la magie, de la méthode Coué. Habités de la force de Dieu, unis les uns avec les autres, nous pourrons faire triompher la justice et la paix qui construisent le Royaume.
La foi et l’Église
Ainsi, même si la foi est une question individuelle, personnelle, dans la relation que nous choisissons de tisser avec le Christ, c’est aussi une dynamique communautaire. Certes, cultiver notre relation à Dieu individuellement n’est pas néfaste, mais elle doit nous amener à habiter et transformer le monde ensemble.
Ensemble
Peut-être que la première lecture de ce dimanche peut nous aider à y voir plus clair dans cette dimension communautaire. Les bras de Moïse levant le bâton de Dieu conduisent à la victoire contre les Amalécites. Mais, tout Moïse qu’il est, il se fatigue vite ; « ses mains s’alourdissent », nous dit le texte. Alors ses proches, Aaron et Hour, lui viennent en aide. Ils utilisent leur intelligence pour que l’œuvre de Dieu, par Moïse, donne à Josué et ses hommes la victoire. Certes, c’est Moïse qui levait les bras et Josué qui conduisait la bataille, mais au final, ce sont tous ceux qui ont contribué à ce que l’action de Dieu, par celle des hommes, s’accomplisse.
Unis les uns aux autres
Ainsi, il est important pour nous de nous sentir liés les uns avec les autres. Chacun d’entre nous a une mission, des capacités, des manières de faire ou de voir. Mais nul d’entre nous ne possède « la vérité » et n’est capable de tout faire. C’est en comptant les uns sur les autres, habités de la foi, que nous pourrons apporter la lueur du Christ à ce monde parfois terne. La communauté permet de tenir bon dans la foi, d’entretenir cette lueur pour qu’elle se vivifie et se répande dans tout l’univers.
Faire corps grâce à l’Eucharistie
Même si nous n’avons pas choisi ceux et celles qui appartiennent à la communauté des croyants, apprenons à nous reposer sur leur prière. Dans l’Eucharistie que nous célébrons, nous témoignons de cette réalité mystique en demandant au Seigneur de nous unir davantage les uns avec les autres. Son corps partagé est là pour que nous soyons pleinement et davantage ce corps offert au monde. Dans notre prière commune, dans notre communion à son corps et à son sang, nous plongeons notre vie dans celle du Christ.
Puisse cette vie déborder en nous et nous donner de croire vraiment en Dieu pour sa plus grande gloire et le salut du monde.