Dernière modification 21 heures by Chrétien en ce temps
« Que reste-t-il à l’homme de toute la peine et de tous les calculs pour lesquels il se fatigue sous le soleil ? » Cette phrase du livre de Qohèleth, nous l’entendons dans la première lecture de ce 18e dimanche ordinaire. Nous pouvons sereinement prendre le temps de nous poser cette question alors que certains d’entre nous sont en congés. Nous pouvons rapprocher cette phrase de Mc 8, 36 : « À quoi sert de gagner le monde si l’on vient à perdre son âme ? » Notre fatigue, le poids du jour que nous nous mettons sur les épaules, est-il utile au salut du monde ? Espérons tout de même que nous sommes des coopérateurs fidèles de la Gloire de Dieu.
Fatigue et service de Dieu
Toutefois, il peut être intéressant, à la lumière des textes de ce dimanche, de nous interroger spirituellement sur notre fatigue. N’y a-t-il pas un risque de notre part d’en faire trop, de nous substituer à Dieu et de nous croire indispensables ? N’oublions pas que Dieu et sa grâce nous devancent. Nous sommes ses collaborateurs, des humbles serviteurs de la vigne du Seigneur. Peut-être nous faut-il nous rendre à l’évidence que « l’humble serviteur a la plus belle place » et c’est elle que le Seigneur nous invite à prendre.
Du bon usage du service
Servir ne signifie pas se consumer, s’épuiser, se rendre malade pour le bonheur de l’autre. C’est être à sa juste place pour laisser au Seigneur la première place. Aussi, il nous faut être disponibles intérieurement pour accueillir son amour et sa grâce.
Prendre la fatigue au sérieux
Une anecdote raconte que saint Jean XXIII, lors d’insomnies liées aux préoccupations quant au gouvernement de l’Église, se disait : « Qui dirige l’Église, Dieu ou moi ? C’est Dieu. Alors je peux dormir tranquille. » Certes, nous ne sommes pas le pape, mais tout comme lui, nous sommes les serviteurs de la grâce de Dieu. Alors prenons notre fatigue au sérieux et remettons-la au Seigneur pour discerner ce qui ne va pas. Nous n’aurons certes pas de réponse immédiate. Mais au fil du temps, petit à petit, une évidence se fera jour. Cela viendra alors que nous lui confierons nos peines, nos inquiétudes, nos questionnements.
Prier pour mieux servir
C’est dans une lente maturation que nous trouverons le sens de notre service. Cette maturation passe par la rumination de la Parole de Dieu et par l’écoute de la parole de vie de nos frères et sœurs. Si notre fatigue spirituelle nous empêche de servir, interrogeons-nous. C’est peut-être que Dieu nous veut ailleurs, et non autrement. Espérons qu’Il nous donne sa grâce pour servir de tout notre cœur et de tout ce que nous sommes capables de faire.
Fatigue et désir
Ce n’est pas d’en faire plus qui importe, de nous fatiguer spirituellement et humainement à la tâche, au risque d’être indisponibles pour le service et pour le Seigneur. Il s’agit véritablement d’examiner notre désir. Cet examen se fait à la lumière d’un cœur à cœur avec Dieu. Notre désir est-il assez débordant, brûlant pour servir comme nous le sentons et pensons ? Être serviteur est essentiel, mais accomplir un mauvais service du fait d’un mauvais ajustement court à notre propre perte.
Se fatiguer pour la Gloire de Dieu
Nous nous fatiguons pour ce qui compte, pour ce qui a du prix à nos yeux, voilà l’important, voilà ce qui sert la Gloire de Dieu. Mais chercher à briller, à capitaliser, à construire des greniers pour amasser du blé, quels intérêts cela sert-il ? En fait, il s’agit de nous laisser interroger par Dieu sur la manière dont nous sommes capables d’aimer et d’agir pour diffuser cet amour qui nous vient de Dieu.
Nous laisserons-nous aimer par Dieu ?
Peut-être que cette fatigue spirituelle que nous ressentons tient au fait que nous ne nous laissons pas suffisamment aimer par Dieu. Nous perdons alors le sens du discernement, de l’écoute attentive de la voix de Dieu qui se dit et se donne dans les signes des temps. Il nous faut alors revenir au bon sens du psalmiste (Psaume 89) qui nous invite, ce dimanche, à faire mémoire de la présence du Seigneur à nos côtés. Avec lui, nous pouvons prier : « Rassasie-nous de ton amour au matin, que nous passions nos jours dans la joie et les chants. » Prier ainsi, c’est nourrir notre espérance en la puissance de l’Amour de Dieu et en tirer des forces pour continuer la route.
Servir Dieu dans le service de nos contemporains
Si nous continuons de cultiver notre désir de servir Dieu dans le service de nos frères et sœurs et si nous sommes bien ajustés à la mission dans laquelle nous sommes, nous portons alors du fruit. Mais souvenons-nous, une fois encore, que nous sommes des coopérateurs de l’œuvre de Dieu. Il nous revient alors de tout mettre en œuvre pour accomplir ce service avec désir et la vive conscience que le Seigneur nous devance. Ainsi, nous laisserons la joie de Dieu nous habiter et prendre le pas sur cette fatigue spirituelle qui nuit à notre croissance.
Désolation et fatigue spirituelle
Soyons attentifs à cette désolation qui peut survenir avec la fatigue spirituelle. Elle est un indicateur qui peut nous entraîner à nous éloigner du service pour lequel nous sommes appelés. La sagesse veut que nous ne prenions aucune décision lors de ces passages à vide. Dans ces moments de fatigue spirituelle, sachons aussi nous en remettre aux autres, à ces frères et sœurs avec lesquels nous cheminons dans la foi, l’espérance et la charité. Leur présence à nos côtés est un précieux trésor qui déborde même les larges greniers dont nous parlent l’Évangile de ce dimanche.
Du bon usage des richesses
Notre richesse ne tient pas en la quantité de biens dont nous disposons. L’argent doit être un serviteur et non un maître. Nous en avons besoin pour vivre dignement, donc ni trop ni trop peu. Il ne doit surtout pas nous éloigner de l’essentiel qui est le service de nos frères et sœurs en humanité et donc le service de Dieu. Comme toutes les choses à la surface de la terre – et fidèle à l’esprit d’Ignace de Loyola fêté cette semaine, ce que nous possédons doit être ordonné au service, à la louange et au respect du Seigneur.
Bien discerner
À nous de discerner la manière dont nous avons à en user. L’objectif est que nos biens ne nuisent ni à notre croissance spirituelle, ni à la dignité humaine de nos contemporains et de nous-mêmes. Cherchons donc ensemble la manière la plus juste de vivre et de servir ensemble, sous l’étendard de la croix, pour avancer, aidés de la grâce de Dieu, vers un monde plus juste et plus fraternel. Ainsi, nous ferons l’expérience « de la douceur du Seigneur notre Dieu » (Psaume 89) au cœur de notre vie, au cœur du monde !