La Semaine Sainte : voie du fol amour de Dieu


Méditations au coeur du monde, Temps liturgiques / vendredi, avril 8th, 2022
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Avec ce dimanche des Rameaux et de la Passion de Notre Seigneur Jésus-Christ, nous entrons dans la Semaine Sainte. Nous serons invités à contempler le Christ dans ces gestes qui le conduiront à s’offrir par amour pour nous. Aujourd’hui nous entendons deux évangiles. Le premier est celui des Rameaux et le second celui de la Passion. Cette liturgie d’entrée dans la Semaine Sainte dit bien le paradoxe de notre foi. Elle est de l’ordre du « En même temps ».

La fragilité de notre foi

D’un côté, le Christ nous attire à Lui et nous nous sentons invités à le suivre de plus près. D’un autre, à la première bourrasque, aux premières vagues, nous récriminons et oublions nos promesses d’alliance et notre fidélité. Nous pouvons donc entrer dans cette Semaine Sainte en prenant conscience de notre fragilité et de notre inconstance. Le Christ n’a pas choisi ses disciples pour leur côté héroïque ou chevaleresque. Il en est de même pour nous. Nous sommes choisis, car le Père estime que nous sommes capables de nous laisser entraîner par son fol amour. Dieu croit en nous pour que nous croyions en Lui. Tel l’ânon de l’Évangile des Rameaux, il veut nous détacher, de nous-mêmes, parce qu’il a besoin de nous.

La Semaine Sainte pour nous détacher de nous-mêmes

Comprendre que le Seigneur veut que nous soyons avec Lui peut nous permettre d’entrer dans le mystère de la Semaine Sainte. Jusqu’au bout les disciples ne comprennent pas grand-chose du message du Christ. Lui, pourtant, continue de les enseigner, de les conduire sur le chemin du plus grand amour. Aujourd’hui, il se conduit avec nous, ses envoyés, de la même manière. La patience et la pédagogie de Dieu sont éloquentes. Mais, comme son Amour est premier, il est incapable de se taire. Cet Amour ouvre les cœurs et délie les langues. Souvenons-nous des miracles de Jésus au profit des sourds et des aveugles.

Entrer dans la louange

Ce sont eux qui donnent aux disciples d’être « remplis de joie ». Cette joie, cette louange qui ouvre la Semaine Sainte sont d’une tonalité bien étonnante. Nous entrons dans le mystère de sa mission et l’Église nous donne, dans cette liturgie, de goûter comme à un avant-goût de cette joie qui nous habitera le soir de Pâques. Peut-être que c’est pour mettre notre cœur en alerte et ne pas entrer dans des lamentations. C’est librement que le Christ s’est offert par amour pour nous. Sur la croix, le Vendredi Saint, il met à mort nos infidélités, nos ruptures d’alliance. Il nous faut en prendre conscience pour entrer dans une dynamique de conversion. Ce qui importe ce n’est pas tant nos péchés, mais notre désir d’avancer sur le chemin de l’amour, de cette vie en abondance que le Seigneur vient nous offrir.

Reconnaître le fol amour de Dieu

Confesser nos péchés, reconnaître nos incapacités, notre sécheresse du cœur n’a que peu d’importance si nous n’écoutons pas le Christ nous susurrer au plus intime de nous-mêmes : « Tu as du prix à mes yeux et je t’aime » (Is 43,4). C’est sans doute pour cela que la Semaine Sainte débute par cette louange des amis du Jésus. Nous pouvons y voir un signe pour notre foi, notre désir de suivre le Christ. Il nous invite à le reconnaître que Celui qui oriente notre vie au-delà de notre propre horizon.

Bâtir le Royaume

Entrer dans la louange c’est aussi vivre dans un dynamisme de service et de charité pour contribuer à bâtir le Royaume ici et maintenant. Certes, cela peut être difficile d’être dans la louange alors que l’Évangile nous fait vivre la Passion du Christ. Mais elle est le porche de notre foi malgré tout et c’est notre mission. Cette célébration des Rameaux nous conduit à la fois à la joie et à la compassion. Il nous sera peut être donné de ressentir les mêmes sentiments d’angoisse, de tristesse, de solitude du Christ. Bienheureux serons-nous alors. Peut-être aussi resterons-nous indifférents, secs à cette souffrance, trop habités par celle du monde, de nos proches ou de nous-mêmes. Il n’y a pas un sentiment meilleur que l’autre.

Accueillir nos mouvements intérieurs

Le Concile Vatican II nous enseigne que « les joies et les espoirs, les tristesses et les angoisses des hommes de ce temps, des pauvres surtout et de tous ceux qui souffrent, sont aussi les joies et les espoirs, les tristesses et les angoisses des disciples du Christ, et il n’est rien de vraiment humain qui ne trouve écho dans leur cœur » (GS 1). Voilà ce que nous sommes appelés à accueillir dans le début de cette Semaine Sainte. Ce que vit le monde, c’est ce que vit le Christ. Son cœur miséricordieux palpite avec nous. Cette tendresse entoure chacun d’entre nous pour que nos pas et nos cœurs soient orientés vers un amour, une charité qui soit toujours plus grand, toujours plus intense. Ce désir du Christ est d’une actualité qui ne s’efface jamais.

Se laisser supporter par le Christ

Nous ne comprenons pas ces appels à davantage de charité, de compassion, de patience envers nous-mêmes et les autres. Pourtant, cette Semaine Sainte est le moment favorable pour entrer dans le mystère de l’amour de Dieu. Reconnaissons que nous pouvons être duels, à l’image des deux évangiles de ce dimanche et des deux larrons qui entourent Jésus. Il ne s’agit pas forcément de la duplicité, mais de notre incapacité à nous laisser entraîner sur le chemin de la joie de l’abandon de la culture de notre ego surdimensionné.

Communier à l’humilité de Dieu

La lecture de l’épître de Paul de ce dimanche (Ph 2, 6-11) peut nous aider à avancer dans cette aventure dedessaisissement. Paul nous montre la manière dont Jésus, tout Fils de Dieu qu’il est, entre dans le dénuement, dans l’abaissement ultime de la mort, pour faire la volonté de son Père. Non que ce dernier ait voulu que son propre Fils meure, mais par ce signe il veut nous faire signe. Nous avons à comprendre que l’humilité, le service de l’autre, pour l’autre entraînent inévitablement le service de Dieu. « L’humble serviteur a la plus belle place ! Servir Dieu rend l’homme libre comme lui » nous dit le jésuite Didier Rimaud dans un célèbre hymne.

C’est à la liberté que le Seigneur nous éduque tout au long de la Semaine Sainte. Nous avons à la vivre dans la fidélité à la vie du Père qui nous offre son Fils en signe de son amour passionné pour chacun de nous. Suprême folie que ce mystère du Calvaire. Entrons donc dans cette Semaine Sainte à la suite du Christ avec une confiance pleine de l’assurance que Dieu nous aime. Il est la route qui nous mène vers le Père, par le don de l’Esprit qui nous assure de l’Amour de Dieu.